lundi 27 février 2012

MAINHORSE (1971)

Polydor 2383 049

... où l'on retrouve Patrick Moraz et son complice Jean Ristori, qui à ce moment-là n'officiait pas encore comme ingénieur du son mais comme bassiste. Nos deux petits suisses sont accompagnés au sein de ce groupe par les anglais Peter Lockett (guitariste, chanteur et auteur de la plupart des paroles) et Bryson Graham (batterie).

Regardez bien la pochette car elle ne ment pas sur le contenu : le choix d’un design art déco assez pompier mais agrémenté de détails saugrenus (le pied qui dépasse, et cette très étrange émanation de bulles dorées qui ferait bizarrement assimiler l'image à un logo pour une marque de bière [?]...) laisse bien préjuger du caractère légèrement obsolète et un peu kitsch de la musique progressive (ou plus exactement proto-progressive, en dépit de la date de sortie) que l'on trouve à l’intérieur...


Le ton est donné dès une "Introduction" assez rapide, qui fait beaucoup penser à du vieux Deep Purple bien que l'orgue de Moraz émette des sonorités plutôt emersoniennes (mais son jeu, dont on peut remarquer la vivacité, n'étouffe pas pour autant le reste du groupe). Passe ensuite "Passing Years" qu'on pourrait résumer comme un "Nights in White Satin" du pauvre (comme quoi Moraz avait bien une place à prendre chez les Moody Blues...), slow joli mais transparent, puis arrive "Such a Beautiful Day", probablement le morceau le plus vif du disque mais aussi un de ceux qui ont le plus vieilli, de durée relativement courte et pourtant un de ceux ayant le plus une structure réellement progressive dans la mesure où le début et sa reprise à la fin sont sur un air significativement différent du milieu (au jeu des comparaisons on pourrait chercher du côté du Soft Machine des débuts). Pour terminer la première face, "Pale Sky" qui se trouve être une composition de Ristori (toutes les autres musiques de l'album sont signées Moraz) n'est pourtant pas celle où la basse est la mieux mise en valeur (ça se passera dans la 2ème face plutôt...) mais la seule où on distingue le violoncelle dont Ristori est censé jouer aussi, et ce que les notes de pochettes appellent "klaviosynthesiser" (un mellotron ?)... ce morceau mollasson (avec une fin un peu plus vive) est un peu à la jonction entre un psychédélisme à l'agonie et un prog tendance planant alors en plein essor (cf. Pink Floyd). "Basia" ouvre la deuxième face avec ce qui semble être, connaissant rétrospectivement l'intérêt de Moraz pour les musiques exotiques, une bossa jouée façon hard-rock (?), intéressante mais un poil longuette, tandis que l'instrumental "More Tea Vicar" serait du pur easy-listening sans le solo de guitare électrique au milieu (Moraz au glockenspiel + orgue). Le magnum opus "God" a été gardé pour la fin et c'est probablement le morceau le plus mémorable du disque, assez proche dans l'esprit général de Yes époque Banks mais plus expérimental avec ses bruits de synthés [?] dans l'intro, et sa structure traversée aléatoirement par un riff mortel (l'occasion de noter aussi que Lockett est un guitariste un peu du même genre que Martin Barre), avec une accélération et un fondu avant un coup de tonnerre au final...


Cet album est un peu daté mais tout de même encore très plaisant à l'écoute, en équilibre entre clichés de son époque et vraie inventivité. Il est surtout remarquablement bourrin (en dehors des ballades et digressions instrumentales cucul...) de la part de Moraz, qui a le mérite en dépit de sa virtuosité déjà incontestable et de son rôle apparent de leader de laisser s'exprimer pleinement le talent des autres musiciens du groupe (auquel il ne manquerait peut-être qu'un chanteur plus charismatique) : ce qu'on a là est de l'horlogerie suisse rock'n'roll (en fait même, c'est certainement ce que j'ai entendu de mieux jusqu'à présent de la part de Moraz en tant que compositeur)...


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